Ce serait donc un nouveau métier. Blogs et réseaux sociaux mis au service des grands médias, et surtout de leurs déclinaisons web rendraient nécéssaire la nomination d’un « community manager », chargé de détecter sur la toile des non-journalistes qui écrivent (sur Twitter, Facebook, des blogs…) et de canaliser/former/exploiter ces talents.
N’aurait-on pas tout simplement ré-inventé le correspondant de presse, et une fonction d’animateur de réseau aussi vieille que la presse locale?
Depuis toujours , le correspondant est aussi indispensable à la presse locale que l’eau au pastis. Dans les zones rurales ou péri-urbaines, c’est lui qui rend compte de l’actualité de sa commune. En ville, on lui confie les sujets que les titulaires de la rédaction n’ont pas le temps, ou pas l’envie, de couvrir. Pas forcément les sujets les plus gratifiants, on s’en doute.
Faiblement rémunéré (quelques centimes la ligne, quelques euros la photo) le correspondant a longtemps œuvré dans le flou réglementaire le le plus absolu. Le législateur a attendu 1987 pour se pencher sur son cas et créer le statut de correspondant local de presse ou CLP. Le correspondant y a gagné le droit de savoir dans quelle case déclarer son maigre revenu et celui de cotiser à l’URSAAF s’il gagne plus de 15% du plafond annuel de la Sécu, soit un peu plus de 5000€ par an.
Qui est-il cet indispensable soutier de la presse locale? Historiquement, c’est le secrétaire de mairie ou l’instituteur du village qui écrivait pour le journal. Comme les bénévoles qui triment dans les associations, les correspondants sont d’origine socio-professionnelle très diverse. Aujourd’hui, les rédactions sont friandes de cadres ou de fonctionnaires retraités à la recherche d’une activité. Car le niveau s’est élevé. On demande aujourd’hui au correspondant d’être disponible au maximum et de fournir un travail proche en qualité de celui d’un journaliste. Et il doit bien entendu être capable de transmettre ses textes et ses photos par internet, a l’aide de son propre matériel.
Esclave de la rédaction? Le raccourci serait trop simple. Au delà de ses honoraires, le correspondant gagne une visibilité, une notabilité, voire une influence dans sa commune. Dans les zones – de plus en plus rares hélas – où subsistent deux titres, tenter de s’arracher les meilleurs correspondants fait partie de la concurrence.
Et puis, ne riez pas élèves sur-diplômés des écoles de journalisme. Deux bons tiers des 35000 cartes de presse de France sont dans les poches d’anciens correspondants, pas tous bacheliers. Les plus pugnaces en effet peuvent espérer intégrer leur rédaction, certains finiront même par la diriger.
Hélas pour la presse locale, le monde des correspondants souffre des même maux que le bénévolat. L’âge moyen grimpe inexorablement, et le recrutement n’est pas facile. Mais tout n’est pas noir: l’expérience démontre que, pour un journal qui y est bien présent, Facebook est un remarquable vivier pour relancer le recrutement et rajeunir les réseaux. Et si le meilleur community manager était celui qui l’est depuis toujours, l’animateur d’un réseau de correspondants?